nouages

Patrice Delaune, sculptures



J’ai découvert les sculptures de Patrice Delaune à la galerie Agnès Szaboova puis lors de son exposition dans un des salons de La Grande école au Havre. Patrice Delaune est également l’auteur du Christ qui orne depuis 2005 la façade de l’Église Saint-Joseph construite par Auguste Perret dans le cadre de la reconstruction de la ville.

Dans la galerie, au milieu des œuvres d’autres artistes, quelques tiges se dressent sur des socles étroits. Les matériaux utilisés sont des morceaux de métal trouvés sur la plage, que le sculpteur redresse ou courbe dans un jeu de déséquilibre, une incertitude qui me touche plus que tout.

À regarder ces sculptures, je vois la nature. Je me tiens devant elles dans un moment d’oubli comme devant la berceuse entêtante d’un mouvement d’herbes sur la terre, l’obstination de la vie à l’œuvre, la reptation de ronces ingrates dressées au bord des chemins. Car ces sculptures peuvent paraître aussi d’une tristesse poignante.


Tiges, hautes herbes de Patrice Delaune, comme un peuple incertain, hésitant et fuyant vers l’ailleurs, – cet air, vide immense, où la ligne étirée, inclinée bascule et disparaît -.

Dans ce jardin sculpté, je choisis le signe, l’inscription d’une sculpture dans l’espace comme le trait de gravure sur la feuille, l’indécision d’une asymétrie, le déséquilibre de fers récupérés et usagés qui égratignent l’air.
Certaines tiges toujours vives sont soudées à un socle profond ; quelques-unes trop fragiles pour soutenir leur propre poids en rejoignent d’autres pour devenir plus fortes et audacieuses.

Sculpter, c’est devenir un pur mouvement dans la lenteur d’un geste. La lenteur et l’équilibre sont choses ardues à harmoniser. Se tenir sur le qui-vive, avec ce tremblement au bout des doigts qu’il faut apprivoiser, tremblement salvateur d’une tige dans l’air, en appelant une autre afin de prendre forme et de s’affirmer dans l’espace.
Une tendresse grimpe le long des fers pour mieux saisir leur lumière gracile et entêtante.


Patrice Delaune, Sculptures, fer, patine, rouille, présentées dans l’Exposition collective de fin d’année, galerie Agnès Szaboova, Le Havre, décembre-janvier 2023
© Agnès Szaboova

https://www.agnes-szaboova-gallery.com/patrice-delaune

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