Miguel Casado, Théorie de la couleur
Avec le temps, la couleur
change
et reste à définir ; on cherche ses secrets,
ses règles, ses mesures, ses retards,
parfois ses échecs.
Les yeux incertains et le regard,
le passage des glacis, des noms,
des lointains. Reste la tension du regard, la fragilité
de la pensée dans le vif désir du réel,
dans le risque même
d’inventer, avec des visions, les réponses.
Parfois, sur quelques pentes,
la couleur s’arrête
à de soudaines limites. Un souvenir
brisé et étrange
de terres de vignes que les feuilles
cachent ou d’ oliviers
ou l’absence soudaine
d’ aiguilles de pin.
Sur quelques pentes; la couleur
s’arrête, et il n’y a rien.
Aucune peau ne se fait signe;
comme un squelette, la terre
est nue, les pierres
roulent comme des yeux, mots
pour ne plus rien dire. Rien
n’est plus éloigné du silence que ces sonnailles
de rien, que cette poussière
de tant d’images.
Rien rien au-delà du silence.
Sur quelques pentes, la vie
s’arrête,
sans aucun lieu.
El día escinde la percepción
al colorear la tierra.
Limita el dolor
con la promesa del tiempo.
Presenta lo ya vivido
como imagen de lo por vivir.
Le jour scinde la perception
en coloriant la terre.
Limite la douleur
avec la promesse du temps.
Présente le déjà vécu
comme l’image de ce qui est à vivre.
Invernales (Hivernales), Premio Arcipreste de Hita, 1985. Réédition partielle de ces poèmes sous le titre :Parauna Teoría del Color (Pour la théorie des couleurs), Nómadas, 1995. Parution en version française, Théorie de la couleur, trad. par Jean-Gabriel Cosculluela, Ed. Propos 2, 2006, coll. Propos à demi