Isabelle Poncet-Rimaud, Dialogues avec le jour
Que dit le jour lorsque Isabelle Poncet-Rimaud dialogue avec lui ?
Il parle d’herbes, d’arbres et d’humains faisant ensemble l’expérience du « silence fendu », où la vie emportée dans les « barques à transporter les morts » cherche son refuge.
Quoique né de l’expérience du confinement, ce recueil traverse les contingences. Le « temps fracassé » qu’il explore est universel. Il ne narre aucune histoire particulière, pourtant il est profondément intime. Le « moi » se fraye un chemin entre l’intérieur et l’extérieur – entre la vue depuis la fenêtre et la ville désertée -, dans un entre-deux qui déjoue les oppositions. Il est animé par le désir d’être et d’écrire.
Dialogues avec le jour ouvre un cheminement apaisé dans l’œuvre d’Isabelle Poncet-Rimaud. La voix qui habite les textes est souvent non humaine, car tout parle. « La nuit bégaie », « le ciel fait signe », l’arbre déploie « l’alphabet », le temps « couvre les pages de mots ». La poète questionne. La simplicité des images dissimule et dévoile en même temps la réponse. Le sens se tient caché dans le silence. Les mots sont choisis pour leur « imperceptible murmure ».
Il fut un temps, « mais c’était autrefois », où, dans le miroir des mots, Isabelle Poncet-Rimaud regardait un être qui disait être elle. Un locuteur la tutoyait et les textes se faisaient l’écho de ses injonctions. Ainsi, les poèmes du précédent recueil, Entre les cils, étaient ceux du “chant empêché”. La poète s’emparait des “mots cannibales” et des “mots cassés” pour écrire la rupture du deuil, de la douleur et de l’attente. Le chant noir se faisait plainte et supplique. Le sens se tenait en suspens au-dessus du chagrin.
A faire l’expérience des Dialogues avec le jour, Isabelle Poncet-Rimaud s’arrime à l’instant qui s’en va. Horizontalité d’une naissance. Écoutant l’arbre, elle naît arbre. Ou bien « poussière du rien », ou « encre effacée » du ciel. Ce qui s’efface devient le lieu de la résistance et ce qui bégaie témoigne d’un désir irréductible d’exister. Dans ce processus , le jour végétal ou céleste pérégrine en elle pour la faire advenir.
La voix de la poète s’incarne. Dans un ressac de « vague amoureuse », elle affirme l’existence de l’être : « j’écoute », « j’entends », « je sens », « je respire », « je croque », « je reçois », « je suis ». Lorsqu’elle ajoute, « mon cœur », « mon esprit », « ma tête » et « mes solitudes apaisées », le sens exprime, fervent, « la faveur d’exister ».
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