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éclats du jour

« Les petits vols de l’inconnu sur l’horizon », Iro Nikopoulou (Grèce)

« La France est un corps humain »

« La France est un corps humain » Regards perdus, sur le quai, assis sur un banc, la tête contre le mur. Fatigué. Sur les genoux, la veste. Il se frotte les yeux, le front. A l’arrêt du train, il se redresse et nous interpelle : « Ecoutez-moi, je vous donne mon avis. Y a le riche qui vit, y a le pauvre qui crève. Après si le cœur vous en dit, vous continuerez vos conneries, vous irez casser vos bidons. Mais moi je dis non. Voilà, c’est tout ! Moi, je suis quoi ? Moi, je vais dire tout. Je suis confondu à des étrangers. Pourtant la France je l’ai aimée. La France, c’est un corps humain. Quand t’as des potes, un humain c’est un humain, mais quand t’es un étranger, t’as pas le droit même de regarder. Quand tu regardes, t’es buté. Quelque chose s’est cassé. » Dessin de Marc-Antoine Beaufils, 2018

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Lia Rodrigues Companhia de danças, « Encantado » (Brésil)

Lia Rodrigues Companhia de danças, Encantado (Brésil) « Je pense que la joie peut être une façon de lutter, une façon de résister. Pas seulement la joie, mais la joie aussi. On peut résister avec de l’espoir, un espoir combattant, une joie combattante ! » Lia Rodrigues Lia Rodrigues Companhia de danças, Encantado, Rio de Janeiro, 2021 1er janvier 2022 : pour une année de joie combattante ! https://theatre-chaillot.fr/fr/saison-2021-2022/encantado ; https://www.festival-automne.com/edition-2021/lia-rodrigues-encantado ; https://www.msn.com/fr-fr/video/style-de-vie/paris-avec-encantado-la-chorégraphe-brésilienne-lia-rodrigues-promet-un-enchantement/vi-AARoHfy

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Victor Malzac, « Jachère » (France)

Victor Malzac, « Jachère »  » – c’est elle encore c’est bien elle maman qui donne de quoi vivre ovale, et bêle fort, notre pays se cabre – et s’élève et féconde la région végétale – ses seins à moudre puisent le plein de blé de seigle ou d’orge ses grands seins gonflent jolis réveillent le village, la joie va se lever dans sa poitrine encore où sève doucement ma grande vie. » 23 décembre 2021 : se tenir là, dans le cercle des naissance. Ronde. Puis ouvrir au monde. Victor Malzac, « Jachère », revue Pourtant, numéro 2, Naissances, 2021, p. 63 https://www.pourtant.fr

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Philippe Malone, Les Chants anonymes, 2021 (France)

Philippe Malone, Les Chants anonymes, 2021 « Certaines mains se tendent la nuit, se confondent à l’ombre, certaines mains plongent dans l’obscurité, t’agrippent et te hissent hors de l’eau, certaines mains ont la douceur d’un rayon de soleil nageant dans une chute d’eau, la voix chaude d’un souvenir, certaines mains susurrent « viens », quelque chose d’approchant, tu ne comprends pas, cela n’a pas d’importance, pas encore, tu saisis juste cette main, le mouvement de cette main, la langue pour plus tard, tu en traverses tant, peu s’incrustent dans ta bouche, mais les mains, certaines mains persistent et hissent et parlent, elles ont les traits d’un visage, un paysage de plaine, des rides claires qui ondulent dans la nuit, certaines mains sont ouvertes comme des visages souriants, n’ont pas la gueule d’un squale, la dureté d’un poing, une double rangée d’ongles, certaines mains caressent et arrachent de l’errance, de l’obscure traversée, l’obscurité n’est pas fiable, parfois cabane souvent piège, l’insécurité des limbes, certaines mains ont la voix chaude d’une brise de surface, elles susurrent et confortent, un visage ouvert, une voix qui accueille, presque une langue, pas encore une langue, pour l’instant une modulation, l’intonation suffit, la caresse de la main, la caresse de cette voix suffit, elle t’agrippe et t’accueille, t’offre un thé, une couverture, certaines mains ont la forme d’une coquille pour y déverser ta voix, même oubliée, même bannie, ta propre voix étrangère à ta bouche, après tous ces voyages, érodée, égarée, trop lourde pour nager, une morte à transportée, ta langue noyée, ta langue de traverse, certaines mains tendent l’oreille, certaines ouvrent leur visage, disent « je ne te comprends pas mais je sais »… » 2 décembre 2021 : 27 personnes noyées. Un gros titre et l’image passant en boucle d’un zodiac chargé d’hommes, de femmes et d’enfants. Je m’émeus, je m’inquiète, mais mes mains sont vides et ma voix ne résonne qu’en moi. Notre corps social meurt quand sombrent tant de vivants. Philippe Malone, Les Chants anonymes, Ed. Espaces 34, 2021 https://www.editions-espaces34.fr/spip.php?page=espaces34_livre&id_article=492, https://www.philippemalone.com/ et https://soundcloud.com/artcena/lecture-les-chants-anonymes-de-philippe-malone

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Giorgos Séféris, Journal (Grèce)

Giorgos Séféris, Journal (Grèce) « [Mon journal] ne veut même pas être complet. Ce sont tout au plus des traces qu’on laisse en passant, des pas sur la neige, pour rappeler cette pièce de Claude Debussy, les traces de quelques moments qui ne sont pas toujours les plus importants, mais les plus libres, ceux qui sont venus. » 14 novembre 2021 : les mots ouvrent des chemins qui se referment derrière eux. A peine prononcés, à peine entendus, ils entrent dans le silence. Seules demeurent leurs traces. Dehors, les feuilles qui se détachent tombent avec tant d’abandon. Georges Séféris, Journées, 1925-1944, trad., préf. par Gilles Ortlieb, Ed. Le Bruit du temps, 2021 https://www.franceculture.fr/oeuvre/journees-1925-1944 Claude Debussy, Des pas dans la neige, Préludes, livre 1, par Daniel Barenboim : https://www.youtube.com/watch?v=Iq0x_gM8tZg

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Tal Nitzan, « Le point de la tendresse » (Israël)

Tal Nitzan, « Le point de la tendresse » (Israël) Le point de la tendresse « C’est ici le point de la tendresse, Même si le cœur en silence fut englouti dans la ville comme une pierre – sache que c’est le point de la tendresse. Donne-moi la main de par le monde. J’ai vu une mère parler avec haine à son enfant tuant des mots, j’ai vu un bâtiment se plier en poussière, étage sur étage, lentement – combien il nous faut de pitié combien nous devons apaiser. Quand la nuit se referme sur la nuque privée de baisers c’est irréparable: à l’étouffement dans chaque gorge, un seul remède, regarde, tout simplement, c’est le point. » 11 novembre 2021 : c’est le brouillard qui apaise en premier. Puis vos visages, beaux à trancher la lumière. Ma tendresse appareille. Tal Nitzan, Soirée ordinaire, traduit de l’hébreu, Al Manar, 2011, coll. Voix Vives de Méditerranée en Méditerranée https://editmanar.com/book-author/nitzan-tal-1/ et https://talnitzanpoet.wordpress.com/

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