nouages

éclats du jour

« Les petits vols de l’inconnu sur l’horizon », Iro Nikopoulou (Grèce)

Elkahna Talbi, « J’ai grandi » (Québec)

Elkahna Talbi, « J’ai grandi » (Québec) « J’ai grandi parmi vous alors pourquoi suis-je encore si petite à vos yeux ? » « Il n’y a pas de peine dans ces larmes que la soif dans ma bouche je ne craque pas je mue. » 9 septembre 2021 : Sous les piles de béton rude d’un viaduc urbain, une voix et son rire abattent un à un les obstacles. Elkahna Talbi, Pomme Grenade, Mémoire d’Encrier, 2021 https://www.queenkapoesie.com/et http://memoiredencrier.com/pomme-grenade/

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Chant Chippewa (Canada)

Chant Chippewa (Canada) « Il résonnera délicatement Le ciel Quand je viendrai faire un bruit » 8 septembre 2021 : vol de mouettes sur le Saint-Laurent. C’est déjà la neige, soufflée sur le ciel chargé. Cité par Laure Morali et Rodney Saint-Eloi, dans Les bruits du monde, Mémoire d’encrier, 2012 http://memoiredencrier.com/les-bruits-du-monde-2/

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« Les crabes »

« Les crabes » Entendu un matin dans le RER B : « Maman ! On est arrivé ? Maman ! On est arrivé ? C’est quoi ça ? Un tunnel ? On va tomber. Le tunnel, maman ! Aie ! Tu me fais mal. Maman ! J’ai peur des bêtes. Tu vois maman, y a un crabe. Ah ! Y a un crabe, plein, plein de petits crabes ! Maman ! Le crabe il monte sur ma tête ! » – La voix suraiguë de l’enfant monte dans l’appel. – « Arrête ! Arrête ! Y a ta maman qui est là !» – Paroles de femme dans un registre de voix de tête, claire et déliée mélangée à une voix de poitrine pour apaiser. L’enfant grogne puis se calme, la bouche collée contre la joue de sa mère. Illustration : Marc-Antoine Beaufils, Sur le fil (détail)

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« Ouf ! »

« Ouf ! » Entendu sur un quai de RER : « Ouf ! » Il a pris un coup à l’estomac et lâché brusquement la respiration. Elle dit, « J’ai un rendez-vous dans dix minutes » -. « Ouf ! ». J’ai entendu une seconde fois le souffle de l’homme et sa réponse, – « Oui, oui, oui ? On se retrouve demain, au même endroit sur le quai, d’accord ? Demain ? Oui ? » – Le « oui » jeté dans la respiration. – « Demain ? » – Le d accentué, du bout des lèvres. La langue entre les lèvres. Le son éteint avant que la respiration ne parvienne à la gorge. Illustration : Marc-Antoine Beaufils, Sur le fil (détail)

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Agnès Geoffray, Suspens & Syncope (France)

Agnès Geoffray, Suspens & Syncope Agnès Geoffray, Suspens & Syncope, performance 2 septembre 2021 : Dans le silence du wagon s’élèvent trois notes balancées à l’accordéon et la voix inattendue d’une femme. Ondulations si lentes, si peu serrées. Juste une émotion qui s’achemine et s’emmêle. Une chanson qui suit le halètement, chiot qui cherche sa respiration. Je ne suis pas de taille contre cette douceur. J’arrondis le dos. « Pour la musique s’il vous plaît ! Au revoir ! Bon voyage ! » https://www.agnesgeoffray.com/photos/Suspens-Syncope_ga579609.html

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Eva-Maria Berg, Horizons Horizonte (Allemagne)

Eva-Maria Berg, Horizons Horizonte (Allemagne) « Les yeux cherchent à colorer le ciel pour disperser le nuage noir ils recourent au premier bleu qui leur avait ouvert les paupières » 30 août 2021 : Ce matin une voix d’homme résonne : « Nous ne pardonnerons pas, nous n’oublierons pas. Nous allons vous pourchasser et vous faire payer le prix. » Je confie ma journée à des instants, entailles d’où s’échappent la gamme des couleurs dans le lever d’une lumière. Eva-Maria Berg et Matthieu Louvrier, Horizons Horizonte, L’Atelier des Noyers, 2021 https://www.eva-maria-berg.de/ et https://www.atelierdesnoyers.fr/

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Ana Brnardić, « Un arbre fortuit » (Croatie)

Ana Brnardić, « Un arbre fortuit » (Croatie) « Je suis un arbre, un arbre fortuit pour ma fille. Elle me touche car je suis rugueux, car j’ai des racines avec mes cinq orteils qui sortent de terre, pour ses petits pieds. Mes yeux sont disposés sur des feuilles, frémissent dans le vent et suivent leur fille du regard. Les filles sont des planètes ardentes et dès que les fleurs se redressent le matin dans leur lit, ces planètes brûlent déjà entre les pétales Les arbres ne connaissent pas la manière qu’ont les filles de t’aimer et de t’adopter. Ils ne font que suivre de leurs feuilles les boules de feu qui descendent le long des tiges, dégringolent les pentes jusqu’au ruisseau gelé, dans une nuée de petites mains. Ma mère aussi est un arbre fortuit. Je me lève le matin, je prépare un café et avec ma tasse je marche sur ses racines dans lesquelles les trains se sont éteints, les pensées refermées, seuls deux brins d’herbe ont frémi. Mes pieds font de la musique sur des touches froides et je sais que c’est un bonheur ordinaire et doux. » 27 août 2021 : Jours de naissance. L’heure se suspend au silence. Ana Brnardić, Devant toi le jour, L’Ollave, 2021 http://www.ollave.org/

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« Ça pourrait nous arriver à nous aussi »

« Ça pourrait nous arriver à nous aussi » Je choisis ma place à côté de vous puisque vous parlez. C’est difficile parfois car vos mots vont plus vite que mon stylo. C’est délicat aussi, alors je fais semblant de rien. J’accumule les fragments, lambeaux, mots rapportés, soigneusement conservés pour réparer la perte de sens des conversations amputées. « Tu as entendu la Brinks ? Il paraît qu’il avait quatorze ans ! C’est terrible à quatorze ans ! Les parents, ils sont où là ? Les mecs ils se sentaient en danger, ils ont tiré quoi ! C’était pour partir en vacances ! Le pauvre, le pauvre gamin ! C’est vrai qu’il faudrait faire quelque chose, que c’est nécessaire et qu’on ne peut pas laisser tous ces jeunes, ces enfants dans la rue. Ce qu’on voit à la télé, ça pourrait nous arriver à nous aussi. Ça pourrait être rapide ! Je suis toujours sidérée de voir comment les gens réagissent devant des cas pareils. J’en parle aux clients, ils peuvent comprendre ! Faut se défendre ! Pour te dire qu’on est bien obligé malgré tout ! »

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Meta Kušar, « Tu es allé tendre l’oreille sous les saules » (Slovénie)

Meta Kušar, « Tu es allé tendre l’oreille sous les saules » (Slovénie) « Tu es allé tendre l’oreille sous les saules Dieu lui-même roulait dans ces brouillards légers qui collent à la rive. La rivière, sans une onde. Le soir avait l’odeur d’une potitza chaude aux raisins. Tu étais heureux. Ça faisait longtemps que tu ne l’étais plus. » Poème de 2004. Traduction française envoyée par la poète. 23 août 2021 : L’heure saute dans le vert. J’ouvre les volets et je plonge avec le jour dans l’herbe sous le tamaris. https://www.poetryinternational.org/pi/poem/5203/auto/0/0/Meta-Kusar/3/en/tile

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